QUESTIONS À BERNARD CHEVASSUS-AU-LOUIS PRÉSIDENT DU COMITÉ SCIENTIFIQUE DU MOBE (Muséum d’Orléans pour la Biodiversité et l’Environnement)
Pourquoi La Loire est-elle le lieu idéal pour découvrir la biodiversité ?
Le territoire ligérien dispose d’une grande diversité. C’est un condensé de tous les milieux qu’il faudrait préserver : forestiers, agricoles, urbains, aquatiques. Les bords de Loire disposent d’un écosystème original lié aux interactions entre humain et la nature. On dit toujours que la Loire est le dernier fleuve sauvage mais comme souvent nature et culture sont imbriquées. Les interactions humaines avec les écosystèmes sont aussi à l’origine de la biodiversité d’aujourd’hui.
Sur le territoire ligérien comme sur d’autres territoires, l’agriculture intensive a accéléré l’effondrement de la population des petits oiseaux. Aujourd’hui, il faut imaginer ce que nous pouvons faire ensemble pour préserver ces espaces qui font vivre les agriculteurs tout en essayant de reconstituer des milieux. Chaque espace a sa biodiversité avec ses espèces adaptées. Parce que la biodiversité dont on a besoin c’est celle qui est sur place et qui contribue à la vie de son territoire.
Pendant le Festival de Loire, vous poserez la question « avons-nous encore besoin de la biodiversité » ? **
En effet, pendant toute une période on a pensé que l’on avait plus besoin des matières naturelles, grâce au plastique et à toutes les fibres synthétiques. Or, chaque jour on découvre les richesses que la nature peut nous apporter. Avec, pour chaque espèce, de nouvelles propriétés, sources de progrès pour la médecine, la fabrication de matériaux... Une espèce vivante est comme une bibliothèque dotée de milliers de livres dont on aurait lu qu’un ouvrage. Chaque espèce qui disparait est comme un livre brûlé qu’on n’aurait pas encore lu.
Prenez le ver arénicole dont on retrouve le tortillon de vase sur les plages bretonnes. On a découvert, il y a peu, que son sang proche de celui des humains, transporte cinquante fois plus d’oxygène que le nôtre. Lors des transplantations, son hémoglobine devient une solution de conservation des greffons inestimable !
Avec la réouverture du MOBE et le festival de Loire, vous faites honneur à la biodiversité, quel avenir a-t-elle, selon vous ?
Avec la réouverture du MOBE et avec le Festival de Loire, nous essayons de donner envie à chacun de découvrir ce patrimoine et de dé- couvrir le plaisir de se promener en reconnais- sant les différentes espèces d’arbres, le chant des oiseaux, les habitudes des insectes... En ce moment même, les feuilles des arbres captent la lumière tels de véritables panneaux photovoltaïques naturels et cassent des molécules d’eau pour produire des fruits. La culture de la nature mobilise tous nos sens. Il faut sans cesse cher- cher des pistes pour donner envie d’être curieux comprendre et s’émerveiller devant les choses de la nature.
La biodiversité, de fait, est entre les mains des humains. Son devenir dépend de nous. Nous avons tous la possibilité d’agir à l’échelle de notre territoire, contrairement au climat. Tout le monde peut faire quelque chose pour préserver et conserver ce patrimoine vivant. Et quand on veut, on peut !